Tous les matins avant d'aller au travail, une femme observe dans un café un couple qui lui semble très uni et heureux, les voir est son petit rayon de soleil de la journée. Mais un jour, elle ne les voit plus, puis apprend que l'homme a été assassiné... elle va alors chercher à lier connaissance avec la femme, pour essayer de comprendre... et se retrouve prise dans une sorte d'engrenage un peu effrayant, le roman glisse presque vers le policier.
A noter que le style est très particulier, l'héroïne, qui est narratrice du roman, ne cesse de se mettre à la place des personnes qui l'entourent en imaginant leurs pensées, de manière si développée et directe qu'on peut se prendre au jeu au point d'oublier quasiment que c'est simplement ce qu'elle s'imagine... jusqu'à ce que l'intrigue se déroule et qu'on ait ensuite les réactions des autres, qui ne sont pas forcément telles qu'elles les avaient imaginées.
Cela donne un style plein de circonvolutions, on peut avoir l'impression de sans arrêt tourner autour du pot, que l'auteur nous fait tourner en bourrique, cela peut agacer et j'ai eu des retours d'autres lectrices qui m'ont dit avoir trouvé ce procédé un peu lourd à la longue. Cela n'a pas été mon cas car la personnalité de l'héroïne m'a été sympathique, en me rappelant un peu ma propre façon de me "prendre la tête" tout le temps.
Extrait :
« Il est un autre inconvénient à pâtir d'un malheur : pour qui l'éprouve, ses effets durent beaucoup plus que ne dure la patience des êtres disposés à l'écouter et à l'accompagner, l'inconditionnalité qui se teinte de monotonie ne résiste guère.Et ainsi, tôt ou tard, la personne triste reste seule alors qu'elle n'a pas encore terminé son deuil ou qu'on ne la laisse plus parler de ce qui est encore son seul monde, parce que ce monde d'angoisse finit par être insupportable et qu'il fait fuir.Elle s'aperçoit que pour autrui n'importe quel malheur a sa date de péremption sociale, que personne n'est fait pour contempler la peine, que ce spectacle n'est tolérable que durant un bref laps de temps, tandis qu'il porte en lui déchirement et commotion et une certaine possibilité d'agir en protagonistes pour ceux qui regardent et assistent, et qui se sentent indispensables, sauveurs, utiles. Mais en constatant que rien ne change et que la personne affectée n'avance ni n'émerge, ils se sentent superflus et dévalorisés, en sont presque offensés et s'en éloignent. »
(lu en février ou mars)